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PHILIPPE HUART

 

Philippe Huart travaille sur différents niveaux de perception et donne à visiter ses carnets de vie

ou à faire le tour de ses fantasmes. Plusieurs lectures sont suggérées par ses toiles : esthétique,

porteuse de messages, lyrique ou réaliste dans une fiction du quotidien pour rendre compte de

l’uniformité et du désordre des informations visuelles qui nous bombardent.

 

Son iconographie a le souci de ne pas dévoiler ce qui fonde les rapports métaphoriques établis

entre les objets et ne les rend que plus fascinants. Le peintre privilégie les surfaces réfléchissantes

où le spectacle alentour, hors champ, vient s’inscrire comme un film sur l’écran. Toutefois,

ce qui est représenté, contraste considérablement au monde inoffensif et redoré de la publicité :

pilules et instruments chirurgicaux, fils barbelés, révolvers, masques à gaz… priment aujourd’hui

dans ces toiles.

 

Son oeuvre s’attache à des zones de hautes définitions de l’image. Mais ses toiles n’ont pas grand

chose à voir avec leur apparence ou les objets représentés. Elles constituent plutôt un ensemble

de motivations et de propositions. Du document photographique initial, il retire les éléments anecdotiques

qui risqueraient de détourner l’attention du sujet principal de la composition. C’est le

traitement de l’image qui l’intéresse avec toutes les ambiguïtés de la représentation.

Dans l’art de Philippe Huart, la souffrance et l’extase, des extrêmes de la coexistence humaine,

sont en effet très proche. À la fois dans ses peintures et dans ses dessins, le défi du spectateur

n'est pas de juste regarder à la surface, mais de s’aventurer dans un second regard troublant. Et

ici, Philippe Huart n’a pas peur de transgresser des limites ou de briser les conventions.

Ainsi les gélules que le peintre prescrit ne dissimulent pas sous leurs couleurs alléchantes les

effets secondaires et pernicieux que leur attirance voudrait faire ignorer. La dépendance à ses

nouvelles Nourritures Terrestres dévoile la portée critique de l’oeuvre et son authentique pouvoir

de perturbation.

 

Il semble que l’artiste est moins intéressé par la reproduction fidèle de l’image que par l’illusion

optique qu’elle représente. Il a une approche conceptuelle du sujet et introduit des mots mettant

l’écriture en représentation pour conjuguer texte et images de manière variée, toujours avec une

certaine finesse. Il aime toujours les reflets du monde extérieur sur les surfaces chromées des revolvers…

Son goût des effets de matière, ses coups de brosses, ses glacis, s’expriment avec une

maîtrise et une science qui évoquent les peintres des natures mortes hollandaises. La miraculeuse

rencontre du brio et du fini dans l’harmonie des volumes et des couleurs donne à ses compositions

une perfection rythmique d’une fascinante singularité.

 

Leurs finitions parfaites leur ôtent tout message purement philosophique, social ou revendicatif

mais laissent percer leur insidieuse violence. Huart se concentre sur un niveau de recherches

quasi anesthésiantes, stupéfiantes où la signification de l’image le rapproche des artistes conceptuels.

Son travail d’une vibrante polychromie reflète paradoxalement une émouvante tonalité, très

sombre, qui semble profondément marquée par la mort.

 

Sa peinture est animée d’intentions ou plutôt de provocations qui ne représentent pas mais créent

une autre réalité à laquelle le spectateur apporte sa propre réponse sensible ou cognitive selon

l’expérience, l’affectivité ou la culture de chacun.

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